jeudi 8 décembre 2011

Les ambassades de France et des Etats-Unis attaquées à Damas

par Khaled Yacoub Oweis

AMMAN (Reuters) - Des partisans de Bachar al Assad ont attaqué lundi les ambassades de France et des Etats-Unis en Syrie, où la répression du mouvement de contestation du régime se poursuit malgré l'ouverture d'un "dialogue national" boycotté par les principaux opposants.

La France et les Etats-Unis ont protesté contre ces attaques, trois jours après la visite de leurs ambassadeurs à Hama, l'un des principaux foyers de la contestation. Les deux pays ont accusé les autorités syriennes de passivité face à ces incidents.

Le ministère français des Affaires étrangères a fait état de "trois agents de postes blessés" tandis que les Etats-Unis ont déclaré qu'aucun blessé n'avait été recensé à leur ambassade ou à la résidence de leur ambassadeur, elle aussi attaquée.

Les gardes de l'ambassade de France ont dû ouvrir le feu pour repousser les assaillants dans un premier temps mais le Quai d'Orsay a fait état d'"attaques récurrentes".

"Devant la passivité des forces de l'ordre, les agents de sécurité de l'ambassade ont été contraints d'effectuer trois tirs de sommation pour empêcher la multiplication d'intrusions dans le périmètre de l'ambassade", écrit le Quai d'Orsay dans un communiqué condamnant ces incidents "avec la plus grande énergie".

"Ce n'est pas avec de telles initiatives illégales que les autorités de Damas parviendront à détourner l'attention du problème de fond qui demeure la fin de la répression contre la population syrienne et la mise en oeuvre de réformes démocratiques", ajoute le ministère.

LES USA ACCUSENT UNE TV PROCHE DU POUVOIR

A Washington, un responsable américain s'exprimant de manière anonyme a déclaré que les forces syriennes avaient finalement établi un périmètre de sécurité autour de l'ambassade des Etats-Unis.

"Nous avons le sentiment que (les forces syriennes) ont failli. Nous allons condamner la lenteur de leur réaction", a dit ce responsable. "Nous avons convoqué le chargé (d'affaires) syrien pour nous plaindre."

Le département d'Etat a accusé la Syrie d'avoir refusé de protéger l'ambassade américaine et il a annoncé que les Etats-Unis allaient réclamer des indemnités.

"Une chaîne de télévision fortement influencée par les autorités syriennes a encouragé cette violente manifestation", écrit le département d'Etat dans un communiqué.

Les ambassadeurs de France, Eric Chevallier, et des Etats-Unis, Robert Ford, se sont rendus jeudi et vendredi à Hama pour exprimer leur solidarité envers les habitants de cette ville où se déroulent des manifestations réclamant la chute du régime de Bachar al Assad.

Les autorités syriennes ont protesté contre ces visites.

La France avait fait état de premiers rassemblements dès samedi soir devant son ambassade à Damas et son consulat à Alep. Elle a convoqué dimanche l'ambassadrice de Syrie à Paris pour protester notamment contre des "outrages" signalés lors de ces manifestations.

Bernard Valero avait alors laissé entendre que ces rassemblements étaient organisés par les autorités, estimant qu'"il y a lieu de penser que le hasard n'avait pas grand-chose à faire dans ces manifestations".

Selon un habitant du quartier damascène d'Afif, où se trouve l'ambassade américaine, quatre cars remplis de chabbiha (ndlr, des miliciens alaouites pro-Assad sont arrivés lundi en provenance de Tartous, une localité située sur la côte méditerranéenne. "Ils ont utilisé un bélier pour tenter de forcer l'entrée principale", a poursuivi ce témoin.

Un diplomate occidental en poste dans la capitale syrienne y voit le signe d'"une violente escalade de la part du régime". "On ne transporte pas des voyous par car depuis la côte jusque dans le centre de Damas sans son assentiment", explique-t-il.

UN CIVIL TUÉ À HOMS

Bachar al Assad, qui a succédé à son père Hafez en 2000, est confronté depuis mars à un mouvement de contestation à travers la Syrie. D'après des opposants, la répression a entraîné la mort d'au moins 1.400 civils.

Lundi, les forces de sécurité syriennes ont tué un civil et en ont blessé 20 autres en tirant à la mitrailleuse à Homs, la troisième plus grande ville du pays, ont déclaré des défenseurs des droits de l'homme. Les forces syriennes ont aussi procédé à des fouilles maison par maison à Hama et elles ont procédé à des arrestations, selon ces mêmes militants.

Parallèlement à cette répression, le pouvoir syrien a ouvert dimanche une conférence de deux jours consacrée à un "dialogue national" afin de réfléchir à des réformes politiques. La plupart des principaux opposants boycottent cette conférence en raison de la poursuite des violences.

"Le dialogue ne peut fonctionner que si les deux parties se respectent mutuellement et se considèrent sur un pied d'égalité", a dit Ayman Abdel-nour, responsable du site internet all4syria.com. "Pour le moment, il n'y a pas de dialogue."

Certains participants à la conférence ont plaidé pour l'abolition de l'article 8 de la Constitution qui stipule que le parti Baas, au pouvoir depuis 1963, dirige l'Etat et la société.

Pour certains spécialistes de la Syrie, d'éventuelles réformes constitutionnelles n'auront aucun effet tant que l'appareil de sécurité pourra agir à sa guise.

Avec John Irish à Paris; Bertrand Boucey et Henri-Pierre André pour le service français

publié sur romandie blog le 11/07/2011 21:50

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