dimanche 25 décembre 2011

frontière ténue entre extrême droite, neo-nazis et sociétés secrètes

Ordres initiatiques ou mouvements néo-nazis ?


Serge Hutin
Serge Hutin : né le 2 avril 1927, décédé le 1er novembre 1997 à la maison de retraite de Prades (Pyrénées Orientales).
Docteur ès Lettres, diplômé de l'Ecole pratique des Hautes Etudes, ex-attaché de recherche au CNRS, franc-maçon, ses engagements sont des plus nombreux.
Auteur de nombreux ouvrages sur l’ésotérisme et les sciences occultes. Il a beaucoup écrit sur l’alchimie, les sociétés secrètes et les Rose-Croix.
Sa vie avait été détruite le 27 octobre 1972 à la mort de Marie-Rose Baleron, celle qui devait devenir sa femme, dans un curieux accident d’avion. Elle était Commissaire de la DST à Nice et enquêtait sur les rapports existant entre la CIA, la loge P2, la mafia corse, le SAC et certains Ordres soi-disant initiatiques…

Le 27 octobre 1972
Que s’est-il donc passé ce jour là ?
Un avion appartenant à la compagnie Air-Inter s'écrase contre une petite montagne, près de Noirétable (Loire). L'appareil est un Viscount de la ligne Paris-Lyon-Clermont-Ferrand. Dans cette catastrophe aérienne, beaucoup de morts, dont l'ensemble de l’équipage, et seulement quelques survivants.
Ce Viscount avait à bord Marie-Rose Baleron de Brauwer, commissaire à la DST à Nice, qui ramenait un rapport d'enquête sur des mouvements d'extrême-droite. Elle enquêtait sur le S.A.C., l'AMORC et l'ORT.
Elle portait au poignet une valise fermée par une menotte contenant ce fameux rapport. Quand on l'a retrouvée, son poignet était sectionné… et la valise introuvable.

Le Viscount avait à bord un autre passager "brûlant" : un grand savant atomiste indien, venu en France établir les bases d'une collaboration nucléaire entre son pays et le nôtre. Pourtant, le plus surprenant reste que cet homme, le professeur Babah, était officiellement mort depuis quelques années...

Qu'allait faire le commissaire Baleron à Clermont-Ferrand le 27 octobre 1972, puisqu’elle était commissaire à Nice ?...
Dans son dernier roman -qui est plutôt une nouvelle- : « La seconde vie du commissaire Marie-Ange Sauneron » (édité en 1998 par Alpha International dont il était Président d’honneur), Serge Hutin nous donne un précieux indice : « Elle venait d’établir un rapport détaillé sur les redoutables infiltrations néo-nazies, en France principalement mais en d’autres pays aussi, dont en tout premier lieu l’Italie, sous le couvert d’une organisation fraternelle apparemment anodine se présentant comme l’authentique Ordre du Temple resurgi miraculeusement de ses cendres et appelé à régénérer l’Occident. » S’agirait-il de l’Ordre Rénové du Temple créé en 1968 par Raymond Bernard ? Tout porte à le croire…

Raymond Bernard

Les 28 et 29 octobre se tenait à Clermont une grande réunion de l'AMORC (Grand Conseil et Séminaire Magistral) dont elle faisait partie... Marie-Rose Baleron était en effet grand délégué aux relations extérieures pour l’Ardèche, l’Aveyron, les Bouches du Rhône, le Cantal, l’Hérault, le Gard, la Haute Loire, la Lozère et le Puy de Dôme ! Elle occupait la vénérable charge de Soeur Marie-Rose Baleron, habitant 12 avenue Félix Faure à Nice. Il semble qu'à cette exceptionnelle réunion elle allait parler de la création de l'O.R.T. impliquant Raymond Bernard... Grand-Maître de l'AMORC... Création à laquelle elle s'opposait (en tant que membre de l'AMORC), et sur laquelle elle enquêtait (en tant que commissaire de la DST en liaison avec les Renseignements Généraux).
Si Marie-Rose Baleron avait été présente le 28 octobre 1972, à Clermont-Ferrand, on peut à juste titre se demander : R. Bernard aurait-il osé affirmer, comme il l’a fait officiellement : « Je ne suis personnellement ni le dirigeant secret, ni le dirigeant officiel, d’une autre organisation que l’Ordre rosicrucien AMORC et que l’Ordre Martiniste Traditionnel » ? Elle lui aurait demandé d’expliquer à tous les rosicruciens pourquoi il avait créé l’Ordre Rénové du Temple en 1968 avec un extrémiste de droite, Julien Origas !
Le fanatisme politique implacable de ce dernier l’incitera à s’allier avec des personnages suspects ne reculant devant rien pour faire triompher leur idéologie d’extrême droite.
Marie-Rose Baleron disposait de preuves attestant que certains néo-nazis camouflaient leurs activités derrière le masque de l’ORT.
Il n’est pas inutile, ici, de rappeler que Julien Origas avait été condamné à quatre ans de prison ferme, en 1945, pour avoir appartenu par le passé à la gestapo française.

L’Ordre du Temple Solaire, créé quelques années plus tard, serait une scission de l’ORT. Il s’illustra tristement auprès du public par un étrange suicide rituel collectif de ses membres, ces derniers se répartissant entre la France, la Suisse et le Québec.
A notre connaissance, Serge Hutin était aussi membre de l’AMORC et, plus curieusement, peut-être aussi membre de l’ORT ! (voir ci-dessous). Avait-il tenté de l’infiltrer pour en connaître les dessous ? Avait-il poussé Marie-Rose Baleron à enquêter sur cette déviation de Raymond Bernard ? Aurait-il ainsi été involontairement responsable de la mort de celle qu’il aimait tant ? Il sera difficile de répondre à ces questions sans continuer notre enquête. Il faudrait pour cela interroger des responsables politiques actuels « au-dessus de tout soupçon » ou peut-être un ex-écrivain (car interdit de publication aujourd’hui) devenu le Monsieur sectes des RG de nos jours… et qui a parfois une attitude plus que curieuse, voire menaçante, vis-à-vis de certaines personnes qui souhaitent révéler la vérité sur l’Ordre du Temple Solaire, émanation de l’ORT.

Quelques explications
S.A.C. : Service d’Action Civique
Fondée en 1959 dans le but d'apporter un «soutien inconditionnel à la poursuite des objectifs définis par le Général», cette officine devint, au fil des années, une nébuleuse mêlant malfrats, policiers, hommes politiques (le «monsieur Afrique» de Charles De Gaulle) et futurs élus (Charles Pasqua).
C’était une organisation paramilitaire spécialisée dans l’assassinat, le chantage, la corruption, le trafic d’armes et de drogue, le blanchiment d’argent “sale”, bref, la criminalité sous toutes ses formes, et par ailleurs dévouée corps et âme au Général de Gaulle.

François Mitterrand

Le SAC sera dissous en 1982, suite à l’affaire dite « d’Auriol ». A quelques jours du 10 mai 1981, François Mitterrand n'est pas encore président, et les membres du SAC de Marseille, réunis avec leurs patrons de Paris, se déchirent autour du très contesté chef local, le policier Jacques Massié. L'heure est grave. Les membres du SAC pensent souhaitable une victoire de la gauche contre Giscard. Ils imaginent que dans ce cas, le chaos qui s’ensuivra permettra le retour au pouvoir des gaullistes !... La suite sera horrible et pitoyable : Massié et les siens, y compris son fils de 8 ans, sont assassinés dans leur maison d'Auriol, près de Marseille, en juillet 1981. Qui a donné l'ordre ? L'Inspection générale de la police mènera l’enquête. C’est ainsi que le SAC sera dissous l’année suivante.

AMORC : Ancien et Mystique Ordre Rosae-Crucis (Ordre rosicrucien AMORC)
L’AMORC est une fraternité internationale composée de 16 juridictions couvrant tous les pays de même langue. Chaque juridiction a pour siège une « Grande Loge » dirigée par un Grand Maître élu pour un mandat renouvelable de 5 ans. L’ensemble des Grands Maîtres compose un Conseil Suprême à la tête duquel l’Impérator est élu pour 5 ans pour un mandat lui aussi renouvelable.
L’Ordre a connu sa résurgence en Europe au XXème siècle sous l’impulsion de l’ésotériste américain Harvey Spencer Lewis, décédé en 1939. C’est après la deuxième guerre mondiale que l’AMORC s’est progressivement développé.
La juridiction francophone a d’abord rayonné en Belgique et en Suisse, puis au Québec, aux DOM-TOM et en Afrique francophone. Le Grand Maître en a longtemps été Raymond Bernard (19 mai 1923 – 10 janvier 2006). Son fils Christian Bernard lui succéda (élu, rappelons-le…) quand lui-même devint Impérator. Les éditions rosicruciennes sont dirigées par son épouse. Christian Bernard succéda plus tard à son père comme Impérator de l’Ordre.
Depuis 1956, Raymond Bernard a successivement pris la responsabilité de l’Ordre de la Rose-Croix AMORC, créé l’Ordre Rénové du Temple, réactivé en France l’Ordre Martiniste Traditionnel, fondé le CIRCES et l’Ordre Souverain du Temple Initiatique.
« Puis il développe l’OMT en marge de l’AMORC, avec enseignement par correspondance et groupes locaux. Après avoir rencontré les cadres de la « résurgence » templière d'Arginy, il publie ‘Rendez-vous secret à Rome’ (1969), un récit allégorique que beaucoup entendront littéralement, et fonde l'Ordre rénové du Temple (ORT), dont il devient le grand maître secret (octobre 1970 - 16 octobre 1972) et dont il rédige l’enseignement par correspondance, avant de s’en retirer en lui laissant prendre sa complète indépendance sous la direction de Julien Origas. »

OSTS
Jouret s’est introduit dans l’ORT, communauté templière du château d’Auty (82), dont Julien Origas est alors le grand commandeur. De son vrai nom Julien Humbert, il est né en Alsace en 1920. Il a créé PORT en 1970 en compagnie de l’écrivain ésotériste Jacques Breyer. On prétend, sans doute à tort, que ce dernier aurait créé l’OSTS (Ordre Souverain du Temple Solaire) en 1952 au château d’… dans le Rhône.
Certains éléments pourraient laisser penser que l’OTS aurait été calqué sur l’OSTS.

OTS

Luc Jouret


Fondé en 1984 par Luc Jouret à Genève sous le premier nom d’OICTS (Ordre international chevaleresque de tradition solaire) avant de prendre celui d’Ordre du Temple Solaire. Il disparaît en 1994 après avoir fait 53 morts : 5 près de Montréal les 4 et 6 octobre (poignardés puis carbonisés) et 48 en Suisse dans deux chalets incendiés. Dans un de ces chalets, les victimes avaient d’abord été tuées par balles, dans l’autre elles avaient été empoisonnées au curare. Les principaux dirigeants en étaient Joseph Di Mambro, un Suisse ayant fonction de cerveau et responsable financier. Il avait été condamné en 1974 à six mois de prison pour escroquerie, abus de confiance et émission de chèques sans provision. Il a fait partie de l’AMORC. Il rencontre un Belge, Luc Jouret, en 1976 et lui fait infiltrer l’ORT. Il en deviendra le Grand Maître en août 1983 jusqu’à sa démission en 1984. C’est cette année-là qu’il crée l’OTS. Il voyage beaucoup, seul ou avec Di Mambro. Il sera condamné pour achat d’armes prohibées au Québec en juillet 1993. Il est possible qu’il ait fait du trafic d’armes du Canada vers l’Australie à cette époque.
Serge Hutin : Aussi curieux que cela puisse paraître, S.H. semblait bien connaître l’Ordre Rénové du Temple… Le 30 avril 1972, il a donné à Lille une conférence sur l’ORT. La commanderie du Nord de l’ORT annonce cette conférence en avril 1972 en ces termes : « Conférence Templière donnée par notre frère Serge Hutin : les Chevaliers du Temple, autrefois et aujourd’hui : l’Ordre Rénové du Temple et le Monde Moderne »

Maurice Monnot

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