lundi 24 octobre 2011

Les Français dans le guêpier Afghan

09/11/2006 - © Le Point - N°1782


Trafiquants de drogue, talibans et seigneurs de la guerre mènent une guérilla farouche contre les forces de l'Isaf, auxquelles appartiennent des soldats français. Les Occidentaux peinent à contrôler la situation et sont contraints de redéfinir leur engagement dans ce pays. Reportage.

L es soldats arrivant à l'aéroport militaire de Kaboul sont prévenus : les drapeaux des pays membres de l'Otan composant l'International Security Assistance Force (Isaf) sont généralement en berne. Chaque fois qu'un soldat de l'Isaf est tué, ils sont descendus à mi-mât. Depuis juillet, ils n'ont atteint que durant trois jours le sommet de leurs hampes... Un symbole emblématique d'une situation militaire qui ne cesse de se dégrader. Depuis fin juillet, l'Isaf est chargée de la sécurité de la zone sud de l'Afghanistan, la plus dangereuse. Trafiquants de drogue, talibans et autres seigneurs de la guerre organisent la résistance. Les forces de l'Isaf subissent aussi leurs assauts dans l'est du pays, frontalier du Pakistan. Un officier britannique estime qu'il ne s'agit pas d'un hasard mais d'une stratégie concertée. Des signes très inquiétants dans un pays qui, au fil des siècles, a mis à la porte tous ceux qui avaient prétendu le conquérir.

Aux 30 000 hommes de l'Isaf s'ajoutent 8 000 Américains de l'opération Enduring Freedom. Les Russes, qui furent ici jusqu'à 140 000, n'ont pas pu tenir. Les Occidentaux feront-ils mieux ?

Le problème du général français Frank Le Bot, commandant les forces de l'Isaf déployées dans Kaboul et sa région, c'est que la capitale est enchâssée dans la région de l'Est et se transforme vite en caisse de résonance. L'instabilité s'accroît. « En août et surtout en septembre , dit-il, nous avons connu les engins explosifs bricolés qui explosent au bord des routes, les roquettes, les attaques suicides. Mais les choses se sont calmées depuis la fin du ramadan. » Jusqu'à quand ? Le général s'inquiète : « On est arrivés avec des certitudes et un projet d'avenir imposé, dans un pays féodal vivant au début du Moyen Age. On ne peut pas gommer une civilisation. Je crains le rejet. »

Chacun sait ici que la capitale afghane est vulnérable. Trop peu nombreuses, les troupes de l'Isaf et l'armée nationale afghane délaissent les régions du Wardak et du Logar, au sud-ouest de la ville, tout en sachant fort bien que dans ce sanctuaire les insurgés s'organisent. Et les soldats de l'Isaf se sentent de plus en plus menacés. A Kaboul, les véhicules militaires ne peuvent plus circuler que par deux, leurs occupants (deux au minimum) tenant leur arme chargée à la main, non sans porter en permanence un casque lourd et un gilet pare-balles. Les sorties en ville sont quasi interdites et la fréquentation des restaurants locaux n'est plus qu'un souvenir... Cependant, les Français ne renoncent pas à leur effort, comme est venu le rappeler durant le long week-end de la Toussaint le chef d'état-major des armées, le général Jean-Louis Georgelin. Après une visite éclair aux 200 commandos des forces spéciales déployés dans la région de Jalalabad et qui rentreront au début de 2007, il est venu à Kaboul tenir un discours réaliste au gros millier de soldats français présents dans la capitale : « L'insécurité grandit. Dans ces cas-là, il faut serrer les rangs et donner l'image de soldats déterminés. Nous pouvons être confrontés à des situations difficiles. »

Le lieutenant Olivier Aguillon, 27 ans, chef de section au 126e régiment d'infanterie de Brive-la-Gaillarde, part patrouiller dans le 17e district de Kaboul, avec une douzaine d'hommes à bord de deux VAB (véhicules de l'avant blindé). « C'est sur la route que nous sommes le plus vulnérables », confirme-t-il. Les ordres sont stricts. Dès que les blindés sont coincés plus de deux secondes dans la circulation, ils se dégagent le plus rapidement possible. Pour éviter d'être la cible d'un attentat suicide... A l'arrivée dans la zone de patrouille, un quartier gris construit par les Soviétiques et principalement occupé par des fonctionnaires, des policiers attendent les Français pour faire, en leur compagnie, une longue patrouille à pied. Sans indifférence ni curiosité, la population ne réagit que peu à cette présence, et un jet de pierre par un enfant passera pour un « petit geste d'excitation ». Sans plus.

L'exemple américain

A cette mission de sécurité générale confiée aux Français s'en ajoute une autre : la formation des officiers de l'armée afghane dans le cadre de l'opération Epidote. Or les troupes de l'armée nationale afghane (Ana) désorientent quelque peu leurs instructeurs. Durant les opérations Medusa et Mountain Fury qui se sont déroulées durant l'été contre les talibans, essentiellement dans le sud du pays, puis pendant l'opération Oqab, en cours dans tout l'Afghanistan, les constatations ont été identiques. Patron d'Epidote, le colonel Franz Chapuis analyse : « Ils ont un très bon comportement au combat, mais ne manoeuvrent pas au sens occidental du terme et ne savent pas agir avec l'artillerie et les blindés. » Pour la plupart, les stagiaires de l'école d'officiers sont d'anciens moudjahidin désormais intégrés dans l'Ana. Combattants aguerris, souvent quadragénaires, ils ont vaincu les 140 000 Russes qui occupaient leur pays, puis les talibans qui leur succédèrent. Avec, c'est vrai, l'aide déterminante des Américains. Dans cette école, ils viennent aujourd'hui apprendre à faire la guerre comme les Français, et surtout comme les GI. Car ici le manuel scolaire est le « Field Manual » de l'armée américaine, et chaque bataillon afghan de 400 hommes compte 6 ou 7 conseillers américains.

En début de semaine, les officiers stagiaires sont allés passer deux jours sur le terrain d'entraînement. Directement arrivé des écoles de formation d'officiers de l'armée de terre de Coëtquidan (Morbihan), le capitaine Jean-Claude Missonier fait face à une classe studieuse de plusieurs dizaines d'officiers. Assisté d'un interprète, il dissèque leur comportement devant le tableau : « Cette section est partie trop vite. Avant de monter à l'assaut de la position ennemie, je dois remettre mon groupe en place. » Le cours sera mis à profit, dans quelques semaines, par ceux des stagiaires qui seront affectés dans le sud du pays, au front, contre les talibans. Leur seule expérience, c'est l'offensive. Pour le colonel Haqmal Babagul, qui les dirige, « tout est nouveau pour eux. Ils ne connaissent pas la tactique ». Le capitaine Missonier résume : « Ils savent amener leurs hommes au combat, mais doivent maintenant apprendre à revenir avec eux. Il faut les calmer. Ces gens ignorent la peur ! » L'ambition des Français consiste donc à apprendre à leurs collègues afghans à canaliser leur ardeur pour les rendre capables d'agir au sein d'une force internationale comme l'Isaf. Lui aussi formateur, le lieutenant-colonel Vincent Lamauve précise : « Individuellement, ils savent se battre et ont le sens du terrain. Mais ils ont des difficultés pour coordonner leurs actions, pour combattre collectivement. Notre plus gros effort porte sur la capacité d'anticipation. Car ils ne prévoient jamais l'action suivante... » Le colonel Babagul développe : « C'est la conséquence de trente années de guerre. Ils ne savent utiliser ni l'artillerie ni les chars. La seule chose qui compte pour eux, c'est l'AK-47. Je parle des vrais combats... »

L'armée afghane ne compte que 28 000 hommes, et chacun s'interroge à Kaboul sur la manière dont elle atteindra en 2009 l'effectif de 70 000 prévu par les accords de Bonn.

Pourtant, son renforcement devient impératif, car l'Isaf peine à contenir des talibans de plus en plus vindicatifs. Ces derniers mènent contre elle la seule guerre qu'ils connaissent : celle des guérilleros et des partisans. Les escarmouches sporadiques ont désormais laissé place à de vraies batailles rangées. Les petits groupes de 10 ou 15 talibans sont souvent complétés par des unités de combat comptant une centaine d'hommes, ou davantage. Les récentes offensives ont été contrées grâce à l'aviation et aux hélicoptères. Dans les années 80, c'est également de cette manière que les Russes ont contenu les moudjahidin. Jusqu'à ce que ces derniers soient dotés de missiles antiaériens par la CIA... Personne à Kaboul ne parierait sur le fait que les talibans et les seigneurs de la guerre enrichis par l'opium ne disposeront jamais de missiles antiaériens. Pour l'instant, ils se lancent dans une tactique à l'irakienne, avec des bombes télécommandées placées au bord des routes et des attentats suicides. L'Isaf a perdu 45 soldats en 2006, et 55 autres, dont 6 Français des forces spéciales, sont morts dans l'opération Enduring Freedom. Cela risque fort, hélas, de n'être qu'un début...

Le retour des talibans 25/05/2006 - © Le Point - N°1758

C e sont les combats les plus violents en Afghanistan depuis la chute des talibans. Attentats-suicides, exécutions, batailles rangées : les turbans noirs signent dans le sud du pays leur retour en force. Des combats qui opposent la milice à l'armée afghane et aux troupes alliées. Deux soldats français appartenant aux forces spéciales (200 commandos installés à Spin Boldak, près de la frontière pakistanaise) ont ainsi trouvé la mort. « Nous allons connaître six mois difficiles », déclarait récemment un responsable du détachement français au sein de l'Isaf (Force internationale d'assistance à la sécurité), forte de 9 000 hommes.

Les raisons d'un tel déferlement de violences ? La frustration des populations pachtounes, majoritaires en Afghanistan, les carences de l'aide internationale et la corruption. Les miliciens islamistes, eux, profitent des royalties du trafic de drogue, dans un pays qui menace de basculer dans l'« irakisation ». Et bénéficient de complicités actives au Pakistan. Caché dans les montagnes méridionales, le mollah Omar l'avait annoncé : « Avec les attentats-suicides, l'Afghanistan sera bientôt un four brûlant pour les étrangers. »

22h57

05/08/2007 - © Reuters - Le point.fr

Hamid Karzaï reçu deux jours à Camp David par George Bush

La reconstruction, difficile, de l'Afghanistan et la menace que représentent les sanctuaires d'Al Qaïda et des taliban au Pakistan seront au menu des discussions, ces dimanche et lundi, à Camp David, entre le président américain George Bush et le dirigeant afghan Hamid Karzaï.

Le dossier des 21 otages sud-coréens retenus depuis plus de deux semaines par les taliban sera également évoqué par les deux dirigeants qui débuteront dimanche leurs discussions.

Deux des membres du groupe de bénévoles évangélistes ont été exécutés par leurs ravisseurs et la Corée du Sud a demandé instamment aux Etats-Unis et à l'Afghanistan de faire tout ce qui était en leur pouvoir pour obtenir la libération des otages.

Des responsables américains ont indiqué que les discussions entre les deux hommes se concentreraient sur la stratégie à adopter en Afghanistan, qui connaît depuis 18 mois un regain de violences sans précédent depuis le renversement du régime taliban, fin 2001, par une coalition internationale emmenée par les Etats-Unis.

Karzaï doit arriver dimanche après-midi dans la résidence présidentielle. Les deux hommes tiendront une conférence de presse commune lundi à 11h25 (15h25 GMT).

Karzaï, qui a survécu à trois tentatives d'assassinat, est considéré comme un allié stratégique des Etats-Unis et bénéficie du soutien du Congrès américain comme de l'administration Bush.

Il a cependant éprouvé des difficultés à bâtir un gouvernement solide dans un pays marqué par des rivalités entre tribus rivales et par la puissance de chefs de guerre dans certaines provinces.

L'AFGHANISTAN, VICTIME DE LA GUERRE EN IRAK ?

Le président afghan est confronté à de nombreuses difficultés à commencer par les attentats suicide perpétrés par les taliban, la hausse du nombre de civils tués dans les opérations militaires de l'Otan et de la coalition internationale et l'essor de la production d'opium.

La situation difficile que connaît l'Afghanistan alimente les critiques de ceux qui estiment que la guerre en Irak a détourné les Etats-Unis de la lutte contre les taliban et Al Qaïda.

Un rapport des services secrets américains rendu public en juillet leur a fourni des arguments supplémentaires. Il établit que l'organisation Al Qaïda et les taliban ont gagné en puissance et entraînent de nouvelles recrues dans la région pakistanaise du Waziristan, près de la frontière afghane.

George Bush a plusieurs fois fait le lien entre la guerre en Irak et le combat international contre Al Qaïda pour tenter de démontrer que l'implication des Etats-Unis en Irak ne les empêchait pas de s'attaquer efficacement au problème du terrorisme international, en Afghanistan notamment.

"L'Afghanistan et l'Irak ne s'excluent pas l'un l'autre dans le cadre de la guerre contre le terrorisme", a déclaré Gordon Johndroe, porte-parole du Conseil national de sécurité de la Maison blanche.

Ces derniers jours, l'Afghanistan et son voisin pakistanais se sont invités dans la campagne américaine pour l'investiture démocrate, l'un des principaux candidats, Barack Obama, ayant déclaré que s'il était élu, il intensifierait la lutte contre Al Qaïda, en menant au besoin des frappes au Pakistan, avec ou sans l'autorisation des autorités pakistanaises.

http://www.tv5.org/ 05/08/2007 20h48

Talibans, otages, drogue et Iran au menu de la rencontre Bush-Karzaï à Camp David

Le président afghan Hamid Karzaï, confronté à l'épineuse crise des otages sud-coréens et à l'opposition des talibans, est arrivé dimanche à Camp David pour des entretiens avec le président George W. Bush centrés sur la lutte contre le terrorisme et le trafic de drogue.

Près de six ans après l'intervention américaine, les discussions devraient aborder la sécurité alors que les talibans contrôlent toujours une bonne partie du pays et que la production d'opium risque de battre un nouveau record en 2007.

Mais à la suite des déclarations de M. Karzaï à la chaîne de télévision américaine CNN dans un entretien diffusé dimanche, l'Iran pourrait aussi être l'un des sujets abordés par les deux hommes.

"Jusqu'à présent, l'Iran a été une aide et une solution", a déclaré le président afghan.

"Nous avons des relations très très bonnes, très très étroites" avec l'Iran, qui "a été un soutien pour l'Afghanistan, dans notre processus de paix et dans la lutte contre le terrorisme et contre le trafic de drogue", a insisté M. Karzaï.

Ces déclarations divergent fortement de la ligne affichée par le gouvernement américain, qui accuse l'Iran de financer le terrorisme, d'armer les insurgés en Irak et en Afghanistan, et de chercher à fabriquer la bombe atomique.

"L'Iran joue sur les deux tableaux dans les rues d'Afghanistan. Je pense qu'ils agissent pour aider le gouvernement afghan. Je pense qu'ils agissent pour aider les talibans, y compris en fournissant des armes", a ainsi déclaré sur CNN le ministre américain de la Défense, Robert Gates.

Le président afghan souhaite aussi aborder la question des victimes civiles de la guerre dans son pays, où les forces de la coalition, parmi lesquelles 27.000 Américains, s'appuient beaucoup sur des frappes aériennes.

Depuis le début de l'année, plus de 600 civils ont été tués dans les violences, dont environ la moitié ont été victimes de "dommages collatéraux" des forces internationales, des drames qui rendent les forces occidentales de plus en plus impopulaires et érodent la crédibilité de M. Karzaï.

Les deux présidents consacreront aussi une part importante de leurs discussions à la crise des otages sud-coréens. Séoul a appelé les Etats-Unis à intervenir, et un responsable de l'ambassade sud-coréenne à Kaboul a espéré dimanche que la rencontre donne "quelque chose de positif".

Les talibans retiennent en otage 21 travailleurs humanitaires sud-coréens, membres d'une église évangélique, enlevés le 19 juillet. Ils ont déjà tué deux autres membres du groupe et exigent la libération de prisonniers afghans en échange de celle des otages.

Mais Kaboul, très critiqué par Washington pour avoir accepté un tel échange de prisonniers en mars dernier, refuse désormais "par principe" de céder aux demandes des preneurs d'otages.

"Nous allons tout essayer pour qu'ils soient libérés en toute sécurité", a déclaré M. Karzaï à CNN, tout en précisant que son gouvernement refuserait toute concession susceptible d'encourager d'autres prises d'otages à l'avenir.

Sur le front de la drogue, une nouvelle production record est attendue cette année dans les régions du sud de l'Afghanistan, contrôlées par les talibans qui financent une partie de leur activité avec ce trafic.

L'an passé, Hamid Karzaï avait rejeté un projet américain qui prévoyait de répandre des herbicides sur les champs de pavot, une mesure néfaste pour le bétail, les autres cultures et l'eau potable.

MM. Bush et Karzaï doivent donner lundi une conférence de presse conjointe.








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